L’inclusion par la sport à la lumière du club sportif USEAB

Publié le 10/07/2024

Un article issue de la revue n°54 “Sport & Développement”

Interview de José Hernandez Pola, USEAB – Union Sportive Electrique Avoine Beaumont.

José Hernandez Pola : Je m'appelle José Hernandez Pola, Je suis un éducateur sportif, salarié à l'USEAB pour l'activité « handball » et pour la sélection « handball » du collège Henri Becquerel. J'ai commencé ma pratique du sport à Cuba où je suis né et y suis devenu joueur professionnel de handball. J'ai participé pour l'équipe de Cuba aux Jeux Olympiques de Sydney en 2000 et j'ai été capitaine de la sélection national de handball de Cuba. Ici en France, j'ai fait une formation pour être éducateur et suis diplômé d'un BPJEPS Sport pour tous. À l'USEAB, j'ai commencé à développer des projets autour du sport avec différents clubs autour de stages internationaux, alliant aspects linguistiques et sportifs.

Pouvez-vous présenter ce qu'est l'USEAB ? Comment est née l'association ?

José Hernandez Pola : L'USEAB (Union Sportive Électrique Avoine Beaumont) est l'un de plus grands clubs omnisport du département de l'Indre et Loire. Créé en 1962, il compte aujourd'hui 21 sections sportives. La gouvernance du club repose sur deux instances de pilotage : un comité directeur composé de représentants des collectivités et de chacune des sections sportives, et un comité exécutif restreint. Basé essentiellement sur les communes d'Avoine et de Beaumont en Véron, le club a pour objectif principal de développer l'offre du sport selon les envies de la population locale et de la rendre la plus qualitative possible. Pour cela, il propose à ses membres de nombreuses activités sportives ou culturelles au sein d'équipements mis à disposition des collectivités. L'association compte environ 2 000 adhérents. Avoine est une petite ville mais qui offre de nombreuses infrastructures sportives de qualité. La jeunesse a donc beau- coup d'options pour pratiquer diverses activités sportives.

Pouvez-vous nous donner un exemple de stage sportif international ?

José Hernandez Pola : Il y a dix jours, nous étions en Espagne avec un groupe de filles de l'équipe féminine de handball de -15 ans du club de Nazelles-Négron pour un projet de solidarité et d'échange à Alicante. L'enjeu de ces stages sportifs internationaux est la pratique du sport par les jeunes filles qui, par des contraintes sociales, délaissent les activités sportives. En outre, beaucoup d'entre elles n'ont pas l'opportunité de faire la découverte d'un autre pays, d'une autre culture ni de pratiquer une langue étrangère. Lors de ce séjour, nous avons joué trois matchs et les retours de la part des filles ont été très encourageants.

D'habitude, je sais qu'il y a une certaine appréhension à partir avec des filles, en raison de sujets souvent tabous ou sensibles : la menstruation, les contraintes spécifiques aux femmes, etc. Mais cela ne me freine pas. Je veux que ce soit égal pour tous : donner la possibilité de participer à des projets de mobilité, découvrir l'Europe et vivre les mêmes expériences de voyage que les garçons. Apprendre à préparer son voyage, rencontrer de nouvelles personnes, échanger et nouer des amitiés. En 2025, nous envisageons de mettre en place un autre projet de mobilité qui pourrait inclure la participation de jeunes filles de -15 ans d'un club d'Avoine. C'est en réfléchissant à ce projet de mobilité, que nous avons eu l'idée de répondre à l'appel à projets du dispositif RECITAL-ODD avec un projet intitulé «Booster un monde inclusif par le sport».

Photo : USEAB

En quoi consiste ce projet «Booster un monde inclusif par le sport» ?

José Hernandez Pola : Ce projet concerne l'USEAB ainsi que ses différents partenaires : le collège Henri Becquerel d'Avoine, l'Observatoire des inégalités, l'Association Handisport 37, le Comité Indre et Loire FFHandball et l'Union Sportive Joué-lès-Tours Handball. L'objectif est de promouvoir l'inclusion par le sport, en sensibilisant les jeunes à l'accès au sport pour tous. Nous voulons devenir un club inclusif, accueillant hommes et femmes de tous âges, et particulièrement les personnes en situation de handicap. Nous promouvons le sport comme un vecteur de valeurs et de socialisation. Nous aimerions accueillir des sportifs de haut niveau, y compris des sportifs internationaux qualifiés pour les Jeux Olympiques et Paralympiques, pour échanger avec les jeunes sur ces aspects.

Comment et pourquoi est né ce projet ?

José Hernandez Pola : Je suis un athlète olympique et j'ai été formé par un éducateur en situation de handicap durant ma petite enfance. J'ai donc été sensibilisé très tôt dans mon pays aux inégalités qui peuvent exister dans la pratique du sport, tout en intégrant que toutes et tous peuvent pratiquer le sport. Cela fait qu'aujourd'hui, je ne vois aucune différence ou inconvénient à jouer avec une personne en situation de handicap. Je voulais transmettre ces attitudes, ces compétences, cette éducation et ce savoir-être à travers l'éducation par le sport.
Pour moi, un projet qui sensibilise à ces questions a du sens dans le monde d'aujourd'hui, où nous demandons moins de jugements et moins d'inégalités. Nous devons faire un travail de fond avec la jeunesse, notamment les collégiens. Le lien avec les Objectifs de Développement Durable est important, car nous voulons promouvoir le bien-être et la santé (ODD 3), réduire les inégalités y compris hommes-femmes (ODD 5 et 10), et réunir des partenaires autour d'un objectif commun (ODD 17).
Nous sommes également dans une zone rurale, à une heure de voiture de Tours, avec une jeunesse parfois isolée qui n'a pas toujours les codes de savoir-être et de savoir-faire. Ce projet, je pense, est un bon début pour bouleverser les bases de l'éducation populaire à travers le sport.

Photo : USEAB


Pourquoi l'inclusion par le sport ?

José Hernandez Pola : Le sport est un vecteur de socialisation, enseignant des valeurs et le respect de règles applicables dans la vie quotidienne : respect des horaires, respect du maillot, respect des autres, etc. Par le sport, nous apprenons l'ouverture aux autres et au monde, et des valeurs comme l'égalité, l'empathie ou encore la responsabilité. Par exemple, une fille qui dirige l'échauffement lors d'un entraînement est suivie par tous, de la même manière que serait suivi un garçon. De même, une personne en situation de handicap peut pleinement participer et exceller dans le sport.


Comment mettez-vous cela en pratique ?

José Hernandez Pola : En premier lieu, pour le club, nous sensibilisons et formons les professionnels pour rendre le sport accessible aux personnes en situation de handicap, notamment par le sport en fauteuil. Par exemple, lors de l'événement « 24 heures de handball », nous avons organisé des matchs de handball en fauteuil, permettant à tous de participer et de se mettre à la place des personnes en situation de handicap. Cet événement, organisé de 9H00 à 23H00 a rassemblé 400 participants et a permis de sensibiliser autant des jeunes que des adultes et des enfants. En deuxième lieu, pour les jeunes du collège, nous souhaitons développer la pratique sportive, notamment chez les filles, et sensibiliser aux inégalités, y compris à travers la pratique de l'handisport. Nous voulons également favoriser les échanges avec des athlètes du Sud et renforcer la confiance de toutes les personnes pratiquant le sport. Par exemple, nous allons réaliser des séances d'intervention au Collège pour des séances pratiques de sport handicap, ainsi qu'une exposition et animation sur les ODD, notamment sur le lien entre « l'inclusion » et les ODD.

Quels sont les prochains événements ?

La semaine du 17 au 21 juin 2024, nous ferons découvrir aux jeunes tous les sports possibles en situation de handicap avec le soutien du Comité Indre et Loire FFHandball, y compris le basket, le handball, le tennis de table, le tir à l'arc, et d'autres. Nous sensibiliserons également à l'inclusion par des discussions et des jeux éducatifs, comme le «Monopoly des inégalités».

Nous organiserons une exposition itinérante sur les ODD et les pratiques d'inclusion par le sport, qui sera présentée à l'USEAB, au Collège (pour susciter des questions et travailler avec les éco-délégués et les matières scolaires), et à l'espace culturel d'Avoine pour être accessible à tout le public.

Quels sont les enjeux pour 2024 liés aux Jeux Olympiques et Paralympiques ?

Les JO sont une grande fête du sport et c'est une opportunité de mettre le sport et ses bienfaits au cœur de notre société. C'est aussi une opportunité pour parler sur la solidarité internationale. Par exemple, nous avons accueilli l'équipe nationale de lutte de Namibie pour les aider à se préparer à la compétition de classification aux JO, offrant ainsi les mêmes opportunités que les pays du Nord, qui ont généralement plus de moyens pour aider à préparer leurs sportifs aux compétitions. Cela a été un souhait partagé avec la Communauté de communes, dans un esprit d'égalité des chances pour la préparation aux épreuves de classification aux JO. Des initiatives comme celle-là permettent de défendre l'idée que le sport doit être accessible à tous.

Pour les jeunes qui ne peuvent pas assister aux rencontres et matches des JO en raison de contraintes financières, nous souhaitons mettre en place des échanges avec des sportifs et de démonstrations à Avoine pour leur offrir un accès à cette expérience unique. Pour cela, nous sommes en contact avec des équipes de Cuba, d'Argentine, du Mexique et du Guatemala. Enfin, nous devons nous concentrer sur l'envoi d'une bonne image des valeurs du sport. Aujourd'hui, le monde traverse des difficultés avec de nombreuses guerres et des informations compliquées pour la jeunesse. Je pense que le sport peut apporter un souffle d'émotions et sortir de la quotidienneté de ces informations négatives.

Quels sont les liens avec les collectivités territoriales ?

L'USEAB a des liens étroits avec la communauté de communes de Chinon Vienne et Loire et la mairie, qui soutiennent notre club omnisport. Tous les sports pratiqués à l'USEAB ont un lien avec ces collectivités. Grâce au dispositif RECITAL, nous avons pu faire un pas en avant sur nos projets sportifs et renforcer ces liens avec les collectivités, ce qui est crucial. «Booster un monde inclusif par le sport» est un projet phare qui peut être réalisé dans n'importe quel autre collège. Dans notre cas, non seulement la collectivité nous a soutenu, mais le collège nous a également ouvert ses portes avec l'accord de la CPE et de la directrice des sections sportives. Les collectivités et les autres établissements qui nous accompagnent ont répondu « présents » avec beaucoup d'énergie, ce qui est très valorisant et nous incite à continuer avec ce projet qui nous tient à cœur.


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