Publié le 09/12/2025

Un article issue de la revue n°57 “Célébrer la Solidarité, des clés pour continuer d’agir”
Photo : Ville de Blois
Une interview de Cédric Marmuse
Cédric Marmuse est conseiller délégué à la médiation culturelle et aux relations internationales Ville de Blois
Cela fait trois décennies que Blois mène des actions de coopération et de solidarité internationale, parfois sans en avoir pleinement conscience. Le soutien à des associations comme Peuples Solidaires ou Artisans du Monde, par exemple, n'est pas toujours perçu comme une action de solidarité internationale, alors qu'il traduit bien l'implication de la ville auprès d'opérateurs associatifs engagés dans ce domaine.
Selon les orientations politiques municipales, il y avait également des actions humanitaires ponctuelles, comme l'envoi de denrées ou d'équipements lors de catastrophes, ou encore l'attribution de petites subventions pour soutenir certains organismes dans les pays touchés. Toutefois, ces actions n'étaient pas pensées en termes de coopération structurée.
La coopération internationale s'est affirmée à travers les jumelages, autour de deux notions principales :
permettre à Blois, ville préfecture, de développer un rayonnement international, et intégrer la notion de réciprocité. Aujourd'hui, celle-ci est centrale : il s'agit de réfléchir à la manière dont des actions menées depuis longtemps peuvent trouver un équilibre réciproque. La coopération n'était pas toujours reconnue, mais elle s'inscrit désormais clairement dans le champ des relations internationales de la ville.
Par exemple, depuis 2008, Marc Gricourt a souhaité créer des jobs d'été pour les jeunes de nos villes jumelles. À l'époque, il n'existait pas de réciprocité : les jeunes blésois ne pouvaient pas partir en mission rémunérée dans d'autres pays. Aujourd'hui, certaines de nos villes jumelles proposent le même dispositif pour accueillir nos jeunes. Acculturer nos partenaires à cette notion n'est pas toujours simple, mais nous y travaillons à travers des projets culturels ou sportifs pour montrer qu'une coopération équilibrée est possible.
La ville répond d'abord à des situations d'urgence. Lorsque l'Ukraine a été agressée et que les mouvements de population ont commencé, nous avons pris en charge des personnes déplacées, mis des hébergements à disposition et mis en œuvre des actions visant à faciliter leur intégration dans la vie de la cité.
Au-delà de ces urgences, le maire est confronté à certains freins, car nous n'avons pas la main sur plusieurs compétences, comme l'eau ou les déchets, qui relèvent de l'agglomération. Notre rôle est donc de travailler avec d'autres collectivités pour trouver des solutions communes. Nous avons ainsi commencé à évoquer, avec la Communauté d'agglomération du Blésois (Agglopolys), le dispositif du “1 %”, qui permet de réaliser des projets de coopération internationale en faveur de l'accès aux services de base (eau, déchets, énergie…). Rien n'est arrêté à ce stade, mais le débat est engagé. Il existe également une réflexion avec le Pays des Châteaux, qui soutient depuis peu ce type de projets. L'idée est de tisser un réseau entre la Ville, l'Agglomération, le Pays des Châteaux et la Région pour impulser réellement de la coopération et de la solidarité internationale.
Cela suppose aussi pour Blois de sortir de ses coopérations ou jumelages historiques et de développer des démarches de partage d'expertise. Par exemple, nous avons été très innovants sur la désurbanisation d'une partie de la ville située dans le lit majeur de la Loire, afin de redonner au fleuve sa capacité d'écoulement en cas de crue. Sur ce sujet précis, nous avons ainsi reçu une délégation vietnamienne pour échanger sur cette problématique qui se pose dans le cadre d'un projet similaire à mener chez eux. Nous leur avons présenté ce que nous avions réalisé il y a 20 ans et comment nous avions réussi à rendre acceptable la délocalisation d'habitants et le rachat de leurs maisons pour permettre cette adaptation.
Nous avons aussi une coopération avec la ville d'Azrou depuis 2011, initialement orientée vers des actions classiques (sport, jeunesse, culture) mais qui s'était un peu éteinte ces dernières années. Grâce au projet EDEN coordonné par Centraider, nous avons pu réactiver nos échanges depuis 2023. Nous avons eu l'opportunité de travailler avec l'ONG Électriciens Sans Frontières (ESF), qui intervient sur l'électrification selon un modèle vertueux. Nous nous sommes rendus sur place afin de comprendre le contexte et d'évaluer les besoins. Il ne reste que très peu de zones non raccordées au réseau électrique ; le projet s'est donc transformé et réorienté vers le partage d'expérience. Il existe une corporation d'électriciens qui a besoin d'apports théoriques, et une école de jeunes en reconversion qui, elle, a besoin d'apports pratiques. Il a donc été décidé de créer des liens entre ces deux groupes, qui ne se côtoyaient pas, et de développer une sorte de mode d'emploi reproductible pour électrifier, par exemple, une école isolée ou un local associatif qui n'est pas encore connecté au réseau.
Parallèlement, les membres de l'association Blois-Azrou vont initier diverses actions : tourisme culturel, valorisation de l'artisanat local, accompagnement paramédical, avec l'envoi de sièges adaptés pour des enfants en situation de handicap et l'intervention d'une kinésithérapeute pour permettre une bonne utilisation de ces matériels. Là encore, nous sommes sur du partage de savoir-faire, de compétences et d'expertises.
Par exemple, […] la désurbanisation d'une partie de la ville située dans le lit majeur de la Loire, afin de redonner au fleuve sa capacité d'écoulement en cas de crue. Sur ce sujet précis, nous avons ainsi reçu une délégation vietnamienne pour échanger sur cette problématique qui se pose dans le cadre d'un projet similaire à mener chez eux.
Je dirais qu'il y a deux aspects. D'abord, faire comprendre à nos habitants que nous ne sommes pas seuls au monde. Blois est une ville multiculturelle, avec des identités multiples, et la coopération devient une reconnaissance de tout ce que les Blésois apportent par leur expérience, leur expertise et leur héritage culturel. Elle permet de valoriser les parcours de vie de nos habitants, qu'ils viennent de pays européens ou plus lointains.
Ensuite, la coopération permet d'aller voir ce qui se fait ailleurs pour nous en inspirer et, éventuellement, le reproduire ici : gestion des déchets, politiques culturelles, sportives ou de jeunesse. Cela nous permet d'élargir notre pensée, de nous déconnecter un peu des politiques nationales et de prendre du recul sur notre action municipale au sens large, car ce sont des sujets transversaux. La coopération enrichit donc notre regard et nos pratiques pour gérer au mieux le quotidien des Blésois.
CENTRAIDER est un réseau régional multi-acteurs, au service de toutes les structures engagées dans des projets de coopération décentralisée et/ou de solidarité internationale (collectivités territoriales, associations, établissements scolaires, hôpitaux, universités, etc.). CENTRAIDER s'est fixé pour objectif l'amélioration des pratiques des acteurs de la coopération et la solidarité internationale.
Siège social
Pôle Chartrain • 140, Faubourg Chartrain, 41100 Vendôme
Tél : 02 54 80 23 09
Bureaux
Le 360 • 78 rue des Halles, 37000 Tours
Tél : 06 42 59 76 32
CIJ • 48 rue du Bourdon Blanc, 45000 Orléans
Tél : 02 38 15 66 59
Espace Tivoli • 3 rue du Moulon, 18000 Bourges


